Rapport Igas sur la formation des chiropracteurs et des ostéopathes : 4 questions à Audrey Yargui


L'Inspection générale des affaires sociales publiait récemment un rapport sur l'agrément des établissements de formation en ostéopathie et en chiropraxie. Dans le cadre de ce rapport, l'AFC retient une recommandation majeure, l'intégration des chiropracteurs parmi les professionnels de santé. Décryptage d'Audrey Yargui, présidente de l'Association française de chiropraxie.

» L'inspection générale des affaires sociales à publié un rapport sur l'agrément des établissements de formation des ostéopathes et des chiropracteurs. Dans quel contexte ce rapport s'inscrit-il ?

"Il apparaît effectivement important de repositionner ce rapport dans son contexte pour bien comprendre de quoi il retourne. Les établissements de formation à l’ostéopathie et à la chiropraxie font l’objet de campagnes d’agrément périodiques par les autorités. Lors de la dernière campagne d’agrément, en juin 2021, la Commission Consultative Nationale des Agréments (CCNA) des écoles formant à la pratique de l’ostéopathie avait refusé le renouvellement d’agrément pour neuf écoles et la délivrance d’un premier agrément pour deux écoles. Le ministère de la Santé avait dans un premier temps suivi l’avis de la CCNA. Dans un second temps, le ministre de l’époque, Olivier Véran, s’était ravisé et avait décidé en octobre 2021, de délivrer un agrément provisoire aux écoles ayant perdu leur agrément. Face à cette situation, quatre syndicats d’ostéopathes avaient démissionné de la commission. C’est dans la continuité de cet épisode que le ministère de la Santé a commandé à l’Inspection générale des affaires sociale (Igas) un rapport relatif à l’évaluation de la procédure d’agrément et des capacités d’accueil de formation en ostéopathie et en chiropraxie.

Rappelons par ailleurs que le refus d’agrément à des écoles d’ostéopathie ne date pas de 2021. La campagne de 2015 déjà avait connu son lot de refus d’agrément. L’hétérogénéité de la qualité de formation comme les procédures opaques des écoles d’ostéopathie non agréées sont souvent pointées du doigt."

» En votre qualité de Présidente, comment avez-vous réagi à la lecture de ce rapport ?

"Eu égard au contexte de commande de ce rapport par le ministère, d’une part, au regard d'autre part de la démographie des chiropracteurs et du fait qu’ils sont formés en France dans une unique école, il était justifié que le rapport s’intéresse plus en détails à la situation problématique des ostéopathes. Pour autant en première lecture, ce rapport m’a beaucoup frustrée voire agacée.

En 2021 en effet, j’avais été entendue par les inspectrices de l’Igas. Nos échanges nous avaient permis de faire valoir les situations très différentes de l’ostéopathie et de la chiropraxie en France. Là où les ostéopathes sont formés dans 31 écoles qui diplôment chaque année plus de 2000 ostéopathes au terme d’un parcours de formation hétérogène, l’Ifec, unique établissement de la chiropraxie en France, délivre 200 diplômes au terme d’études particulièrement exigeantes.

Ayant eu l’opportunité de défendre notre modèle interne de régulation de la profession, j’ai regretté que le rapport amalgame nos deux dispositifs de formation. Ceci étant dit, lorsque l’on s’adonne à une lecture détaillée et attentive du rapport, on constate qu’au-delà du plan qui peut prêter à confusion, dans sa rédaction, le rapport n’incrimine pas la formation des chiropracteurs.

Passé cet agacement, j’ai pris de recul sur ce rapport dont les conclusions sont en définitive très porteuses pour notre profession."

» S'agissant des conclusions et recommandations du rapport, que doit-on en retenir ?

"S’agissant de la formation des chiropracteurs telle que délivrée par l’Ifec, je suis fière de constater l’avance qu’a le collège français de chiropraxie sur les recommandations émises.

En effet, l’ensemble des préconisations de la commission compte déjà au titre des pratiques de l’Ifec : place de la recherche dans la formation initiale, participation d’examinateurs externes, enseignements interprofessionnels au service du parcours coordonné du patient, collaborations avec l’université. Toutes ces recommandations sont déjà une réalité à l’Ifec.

S’agissant de l’agrément des écoles, l’Igas suggère des évolutions qui vont dans le sens du renforcement de la qualité et de la sécurité des soins que ces jeunes professionnels dispenseront aux patients. Là où actuellement, l’agrément des écoles se fait principalement sur le papier, l’inspection recommande notamment de mettre en place des visites sur site confiées aux agences régionales de santé. Nous partageons cette nécessité d’un agrément qui ne soit pas une simple formalité administrative.

Mais ce que je retiens avant toute chose de ce rapport, c’est la volonté assumée de l’Igas de renforcer le cadre d’exercice des chiropracteurs dans le sens historiquement porté par notre association : le rattachement aux professionnels de santé. Les auteures du rapport évoquent en effet l’inscription des chiropracteurs au Livre III du code de la santé publique qui rassemble, entre autres, les auxiliaires médicaux (infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures, orthophonistes et orthoptistes). Cette recommandation va nourrir notre stratégie politique. En effet, les chiropracteurs sont actuellement dans une position d’entre-deux qui doit être clarifiée.

Nous ne sommes pas professionnels de santé mais bénéficions de prérogatives très étendues dans le champ de la santé.

Conformément au décret n° 2011-32 du 7 janvier 2011 relatif aux actes et aux conditions d'exercice de la chiropraxie, et les activités et compétences, le chiropracteur peut en effet :

  • recevoir ses patients sans prescription médicale. Il est un thérapeute de première intention;
  • pratiquer des actes de manipulation et mobilisation manuelles, instrumentales ou assistées mécaniquement, directes et indirectes, avec ou sans vecteur de force. Le chiropracteur est, avec le médecin, le seul professionnel de la santé habilité à pratiquer des manipulations cervicales en première intention.
  • prendre en charge troubles de l'appareil locomoteur du corps humain et de leurs conséquences, en particulier au niveau du rachis, à l'exclusion des pathologies organiques qui nécessitent une intervention thérapeutique, médicale, chirurgicale, médicamenteuse ou par agents physiques. Il lui appartient donc de formuler le diagnostic d’exclusion ;
  • orienter le patient vers le médecin radiologue pour la réalisation d’un acte d’imagerie médicale dans le cadre d’une démarche diagnostique.

Pour affirmer nos positions dans le dialogue avec les autorités, nous ne manquerons pas de mettre en exergue le modèle suisse, où les chiropracteurs comptent parmi les professions médicales. Le modèle danois, que nous avons exploré l’an passé, doit également inspirer les travaux.

Nous voyons dans le rattachement aux Livres du code de la santé publique la possibilité de mieux encadrer l’exercice des chiropracteurs, au bénéfice de la qualité des soins et de la sécurité du patient."

» Quelles seront les suites de ce rapport ? Que peut-on en attendre ?

"Comme je vous le disais, ce rapport a été commandé à l’Igas par Olivier Véran, alors ministre de la Santé. Il appartient désormais au ministre François Braun et à son administration de déterminer les suites à donner à ces préconisations.

Il n’en demeure pas moins que ce rapport va dans le bon sens et alimente la stratégie de l’Association française de chiropraxie.

Comme chacun le sait, nous avons toujours porté l’approche la plus sécuritaire et vertueuse de nos pratiques. C’est tout le sens des négociations que nous conduisons avec le ministère de la Santé sur la mise en place de règles professionnelles. Dans nos prochains échanges avec nos interlocuteurs, nous ne manquerons pas de le leur rappeler"


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